Le capuchon belge : un accessoire du costume pénal de 1875 à 1950

Détenu muni du capuchon belge à la prison cellulaire de Bruxelles

En application de la loi de 1875 destinée à prévenir la récidive, un accessoire est ajouté au costume pénal du détenu soumis à la règle de l’emprisonnement cellulaire individuel : le capuchon qui doit être baissé sur son visage, dès qu’il se trouve en un lieu où il est susceptible de rencontrer ou de croiser d’autres détenus ou bien des personnes étrangères à la détention. L’utilisation du capuchon est justifiée par le souci d’éviter aux détenus de se « contaminer » entre eux…

Lors de son instauration, s’ouvre un débat en vue d’apprécier l’impact exact de cet accessoire sur la peine. La question s’est posée notamment de savoir s’il ne constituait pas une aggravation de la peine,
« une cellule dans la cellule » pour certains.

Le port du capuchon belge, peu usité en France à l’exception de la prison de Fresnes, est aboli en octobre 1950.

Détenu portant le capuchon belge à la prison cellulaire de Bruxelles.

Gravure parue dans L’Univers illustré n° 1685
du 9 juillet 1887.

Détenus portant le capuchon belge avançant dans un couloir de la prison de Fresnes

Détenus portant le capuchon belge, dans un couloir de la prison de Fresnes.

Photo Henri Manuel, 1930.

À propos de la loi du 5 juin 1875

Le rapport du directeur de l’Administration pénitentiaire, Albert Choppin, au ministre de l’Intérieur à propos de la loi du 5 juin 1875 sur la séparation individuelle dans les prisons départementales, vante les bienfaits de l’usage du capuchon belge, dans le cadre du régime de l’emprisonnement cellulaire individuel :

« Le régime de l’emprisonnement individuel consiste essentiellement dans un ensemble de mesures ayant pour but, d’une part, d’assurer la suppression absolue de toute communication des détenus entre eux, sans que leur santé en puisse être aucunement altérée, d’autre part, de contribuer à leur amendement par des exhortations morales, par l’instruction scolaire et par le travail. »

Prisonnier recouvert du capuchon d'étamine à la prison de Fresnes

Le directeur vante ensuite les mesures d’isolement mises en place dans les prisons de la Belgique et de la Hollande…

« Le procédé adopté consiste dans l’emploi d’un capuchon formé d’une étamine de fil et couvrant complètement, lorsqu’il est abaissé, la tête et le visage ; le détenu qui en est revêtu voit très nettement les objets à travers le tissu, sans qu’il soit possible, même de près, de distinguer ses traits, et sa respiration n’en est aucunement gênée.

Au signal donné pour indiquer les heures de distribution de vivres, d’eau, de linge, de matières premières, de réception de travail, et généralement dans toutes les circonstances où, soit la porte, soit le guichet de la cellule devrait être ouvert en présence d’un détenu ou d’une personne n’ayant pas autorité, emploi ou mission accréditée dans la maison, les prisonniers sont astreints à baisser aussitôt leur capuchon ; il en est de même lorsqu’ils sont avertis de se préparer à sortir de leur cellule pour quelque motif que ce soit. […] Le capuchon est relevé au signal convenu, dans les préaux et dans les stalles de la chapelle ou de l’école, ainsi que dans les locaux où l’emploi en serait inutile […].

Détenu portant le capuchon belge à la prison de Fresnes

J’ai cru devoir, conformément, d’ailleurs, à l’avis du conseil de l’inspection générale, insérer dans l’instruction sur le régime des prisons cellulaires l’obligation du port du capuchon belge. On alléguera que la mesure a un caractère de contrainte corporelle en opposition avec les idées qui ont généralement cours chez nous. Son innocuité parfaite, sous le rapport de l’hygiène, est consacrée par une expérience de plusieurs années dans un pays voisin ; les détenus qui ont le souci de leur relèvement ultérieur l’accepteront avec reconnaissance, et quant aux autres, si elle contribue à leur rendre la prison assez pénible pour leur inspirer la crainte d’y rentrer, c’est un résultat dont nous ne saurions nous plaindre […].

Sous certaines conditions, l’usage du capuchon serait rendu moins rigoureux à l’égard de certaines catégories de détenus qui peuvent se voir entre eux, sans qu’il en résulte d’inconvénients graves : les individus prévenus, accusés ou condamnés à raison de crimes ou délits politiques, les condamnés en simple police, à l’exception des filles publiques, et les jeunes détenus… »

Texte intégral en ligne sur le site de l’ENAP.

cf « L’essentiel sur l’histoire du costume pénal », Philippe Poisson, 2008.

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