« Approches territoriales de l’enfermement en Aquitaine »

"Les prisonniers politiques", dessin satirique du quotidien collaborationniste "La France au Travail", du 3 septembre 1940

Les 5es Rencontres historiques du Fort du Portalet se tiendront à Urdos, le samedi 13 novembre 2010, sous la direction de Christophe Lastécouères, maître de conférences en histoire contemporaine à Bordeaux 3.

En voici le thème : Approches territoriales de l’enfermement en Aquitaine

Journal La France au travail du 3 septembre 1940. Dessin de Gaston Pavis ainsi légendé : « Et toi, quel est ton crime ? – D’avoir été clairvoyant ! » On y voit des « prisonniers politiques » qui ont été écroués à la Prison militaire de Paris sur ordre de Mandel et qui se retrouvent, à partir du 21 juin 40, internés provisoirement au camp de Gurs.

Présentation des Rencontres

La question de l’enfermement pendant la Seconde Guerre mondiale est un champ d’étude inépuisable pour les historiens. Devant une réalité qui apparaît de plus en plus mouvante.

qui enferme-t-on, pourquoi et dans quel type de structure ? – ces derniers se sont efforcés de mieux définir l’originalité de ce mode de surveillance de la société. Désormais, ils privilégient les critères « territoriaux » : la prison et le camp ne constituent pas, en dépit des prétentions de l’administration, des mondes clos et parfaitement définis mais des mondes aux bords incertains, toujours imbriqués dans leur environnement immédiat. L’étude de trois lieux d’enfermement situés en Aquitaine (Gurs, Eysses et Carrère) devrait apporter une contribution intéressante à cette approche « territoriale » de la détention politique. Sous la direction de Christophe Lastécouères, les débats mettront en lumière les travaux menés par les historiens Corinne Jaladieu, Jacky Tronel et Pascal de Toffoli.

Déroulement du programme :

Introduction par Christophe Lastécouères : Rappel des Rencontres passées, place de l’enfermement et de l’internement dans ces Rencontres, rappel de l’importance historiographique de ces deux thématiques et du renouvellement dont elles ont fait l’objet, présentation des trois communications à suivre….

« Etude comparée de deux replis : les prisons militaires de Bordeaux et Paris à l’été 1940 »

Le premier intervenant, Jacky Tronel, travaillera sur une séquence chronologique courte (l’été 1940) en présentant une étude comparée des « replis » de la prison militaire de Bordeaux et de Paris, toutes deux déplacées dans les Basses-Pyrénées au camp de Gurs. Ici, la confusion des normes (les hésitations entre formations « virtuelles », transferts effectifs et dissolutions d’une part, entre enfermement et internement d’autre part) est dépassée par une analyse de l’organisation sociale et spatiale de ces deux « replis » : administration militaire, conditions d’alimentation et d’hygiène, le tout étudié en fonction des différents régimes de détention… C’est bien à une vision obsessionnelle du contrôle politique par l’appareil d’Etat français (avant et après Vichy) que l’on aboutit. Le rôle de Mandel sera à cet égard mis en valeur.

« Le microcosme eyssois entre logique de contrôle et logique d’exclusion (1943-1944) »

Corinne Jaladieu reviendra ensuite sur une thématique qu’elle a déjà largement étudiée, reprenant les acquis de sa recherche sur la centrale d’Eysses, plus particulièrement au cours des années 1943-1944 pendant lesquelles Eysses donne le « tempo » à la politique française d’enfermement : un modèle devenu, en quelques mois, un contre-modèle… Ou comment la confusion des normes (une prison centrale « concentrant » des politiques et, surtout, des internés administratifs) se traduit tout à tour par une logique de surveillance et de redressement (qui n’est pas exclusive d’un relâchement administratif, d’un assouplissement des régimes de détention, de la mise en œuvre de solidarités entre détenus et de l’apparition d’une interdépendance entre l’intérieur de la prison et l’extérieur, autant de phénomènes que cristallisent les « événements » eyssois de fin 1943 – début 1944) à une logique de répression pure et d’exclusion à partir de l’échec de la tentative d’évasion de février 1944 et de l’apparition du phénomène de « miliciarisation ».

« Le camp de Carrère dans le dispositif d’enfermement eyssois (1942-1949 »

Pascal de Toffoli clôturera l’après-midi en présentant une étude synthétique du camp de Carrère sur la longue durée (1942-1949). Carrère, annexe d’Eysses, représente l’envers du décor du « microcosme eyssois » dont parlera Corinne Jaladieu. Les phénomènes de chassés-croisés entre groupes de détenus politiques se traduisent par une confusion exceptionnelle des normes : dès la première période de son histoire, Carrère est une « sous-prison » d’Eysses qui tient lieu de camp d’appoint, une ambiguïté maintenue jusqu’en 1947 à travers, notamment, le cas inouï des prisonniers de droit commun de 1946-1949, catégorie hybride constituée d’anciens résistants condamnés pour des délits de droit commun. Cette confusion donne lieu aussi à des phénomènes de relâchement administratif inédits et, en fin de compte, à des antagonismes de populations (surtout au cours de la période 1946-1949) qui mettent en lumière une interdépendance très forte avec l’extérieur et trahissent le climat de guerre civile des années qui suivent la Libération.

Le propos conclusif de Christophe Lastécouères mettra en valeur les apports des trois intervenants dans l’interprétation du Fort du Portalet.

Infos pratiques

Accès libre dans la limite des places disponibles.

Renseignements et contacts : Marthe Clot, Ecomusée de la Vallée d’Aspe, Mairie de Sarrance, 64490 SARRANCE, tel. 05 59 34 57 65.

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