Mauzac, camp Sud : prison pour femmes de 1947 à 1951

Au lendemain de la Libération, partout en France, les prisons débordent…
Les hommes et les femmes jugés et condamnés par les nombreuses cours de justice de l’Épuration viennent grossir la population pénitentiaire déjà écrouée dans les maisons d’arrêt et les maisons centrales. En 1947, le camp Sud de Mauzac (Dordogne) est spécialement affecté à la détention des femmes.

L'un des dortoirs de la prison pour femmes de Mauzac en février 1950.

Les deux dessins à la plume qui illustrent cet article représentent l’intérieur d’un baraquement de la prison pour femmes de Mauzac. Dessin de prisonnière, janvier-février 1950 © Coll. J. Tronel.

Au début du mois d’octobre 1947, le camp Sud de la prison de Mauzac est vidé de sa population masculine : 128 des détenus qui s’y trouvent sont transférés vers la Maison centrale de Fontevrault (Maine-et-Loire), 182 vers la Maison d’arrêt de Périgueux (Dordogne) et 30 vers la Maison d’arrêt de Tulle (Corrèze).

Le 22 octobre 1947, 325 femmes arrivent à Mauzac, en provenance du camp de Rouillé (situé près de Poitiers) qui vient d’être dissous. Parmi elles se trouvent 11 ex-condamnées à mort.
Le camp Sud est alors dirigé par Joseph Chaussat, sous-directeur du centre pénitentiaire de Mauzac. Du 22 octobre 1947 au 15 février 1951, 946 femmes sont incarcérées à Mauzac. Un pic est atteint le 26 février 1948, avec une population de 547 détenues.

Vue aérienne du Camp Sud de la prison pour femmes de Mauzac.

Vue aérienne de la prison pour femmes de Mauzac, camp Sud © Photo DR.

À la fin du mois de janvier 1948, 16 d’entre elles venant de Le Blanc (Indre) et de Tours sont signalées comme ayant résidé en Dordogne avant leur arrestation. Cette situation semble inquiéter le préfet de la Dordogne qui s’en ouvre au Garde des Sceaux, André Marie.

Cette même année 1948, deux importants convois arrivent à Mauzac. Le 23 février, 155 « détenues politiques » proviennent de la maison d’arrêt de Pau. Le 5 novembre, en raison de la dissolution du centre pénitentiaire de Jargeau (Loiret), 122 femmes sont repliées à Mauzac. Le 2 février 1949 a lieu le dernier transfert significatif. Il s’agit d’un groupe de 79 femmes issues de la prison de La Santé.

Dessin représentant deux prisonnières détenues à la prison de Mauzac en 1950.

L’examen d’un premier registre de 678 détenues nous renseigne précisément sur les motifs d’internement des femmes se trouvant à Mauzac :

• Atteinte à la sûreté de l’État : 31,8 %
• Trahison : 29,8 %
• Intelligence avec l’ennemi, une puissance étrangère ou l’Allemagne : 26,8 %
• Relations, commerce avec l’ennemi et faits de collaboration : 4,0 %
• Actes de nature à exposer des Français à subir des représailles : 2,5 %
• Dénonciation : 2,1 %
• Espionnage : 1,8 %
• Activité de nature à nuire à la défense nationale et port d’arme : 0,9 %
• Recel de pillage : 0,3 %

Ce même registre permet d’établir le tableau des peines suivant :
• Condamnations à mort : 10,33 %
• Travaux forcés à perpétuité : 14,31 %
• Travaux forcés à 20 ans : 17,70 %
• Travaux forcés à 15 ans : 9,88 %
• Travaux forcés à 12 ans : 0,44 %
• Travaux forcés à 10 ans : 19,32 %
• Travaux forcés à 9 ans : 0,15 % • Travaux forcés à 8 ans : 1,92 %
• Travaux forcés à 7 ans : 1,77 % • Travaux forcés à 6 ans : 0,15 %
• Travaux forcés à 5 ans : 10,91 % • Réclusion à perpétuité : 0,59 %
• Réclusion à 20 ans : 0,88 %% • Réclusion à 15 ans : 0,44 %%
• Réclusion à 10 ans : 4,13 %% • Réclusion à 8 ans : 0,88 %%
• Réclusion à 7 ans : 0,44 %% • Réclusion à 5 ans : 5,76 %

L’étude des cent premiers numéros d’écrou nous donne une fourchette d’âges allant de 19 à 67 ans, avec une moyenne de 43 ans. 50 % de cette population est âgée de 19 à 40 ans (dont 58 % a moins de 25 ans), 46 % a de 41 à 60 ans et 4 % a plus de 60 ans.

Les différents rapports médicaux établis par le Docteur Espérou, médecin militaire affecté aux camps Nord et Sud de Mauzac, révèlent un état sanitaire globalement satisfaisant. Toutefois, les statistiques dont on dispose semblent lui donner tort : trois décès sont enregistrés pour l’année 1948 et sept pour l’année 1949.

La plus illustre des prisonnières de Mauzac se nomme Madeleine Corabœuf, alias Magda Fontanges, ancienne maîtresse de Mussolini.
cf Magda Fontanges, « Mata Hari de pacotille » écrouée à Mauzac de 1948 à 1951.

Le 15 février 1951, le camp Sud est entièrement vidé de sa population pénitentiaire féminine : les 334 dernières détenues présentes à Mauzac sont transférées vers la maison centrale de Rennes, entraînant ainsi la fermeture définitive de la prison pour femmes de Mauzac.

Pour en savoir plus :
Françoise LECLERC et Michèle WEINDLING, « La répression des femmes coupables d’avoir collaboré pendant l’Occupation », Clio, numéro 1-1995, Résistances et Libérations France 1940-1945, [En ligne], mis en ligne le 01 janvier 2005.
URL : http://clio.revues.org/index519.html. Consulté le 29 juillet 2010.

2 Commentaires de l'article “Mauzac, camp Sud : prison pour femmes de 1947 à 1951”

  1. Siegwarth Hélène dit :

    Bonjour, je suis la fille d´une des femmes accusées de collaboration.. Ma mère étant à présent décédée, j´aimerais entrer en contact avec les auteurs: F. Leclerc et M. Weindling… J´aimerais leur parler, pour moi-même comprendre et aussi pour leur fournir certaines informations..
    Merci
    H. Siegwarth

  2. Jacky Tronel dit :

    Bonjour,
    Je n’ai malheureusement pas les coordonnées des deux auteures du texte « La répression des femmes coupables d’avoir collaboré pendant l’Occupation ».
    Vous en saurez davantage en cliquant sur le lien suivant : ici
    Cordialement, J. Tronel

Laissez un Commentaire