État numératif de la population des prisons parisiennes au 1er janvier 1823…
Par Jacky Tronel | samedi 26 juin 2010 | Catégorie : Dernières parutions, DES PRISONS… | Pas de commentaireAu début du XIXe siècle, la surveillance des prisons parisiennes – y compris les prisons militaires de l’Abbaye et de Montaigu – dépend du préfet de police de la ville de Paris. L’arrêté du 12 Messidor an VIII (1er juillet 1800) stipule en effet que revient au préfet « la police des prisons, des maisons d’arrêts, de justice, de force et de correction de la ville de Paris. […] Il aura la nomination des concierges, gardiens et guichetiers de ces maisons. Il délivrera les permissions de communiquer avec les détenus pour faits de police. Il fera délivrer aux détenus indigents, à l’expiration du temps de détention porté en leurs jugements, les secours pour se rendre à leur domicile, suivant l’arrêté du 23 Vendémiaire an V [14 octobre 1796]. »
Périodiquement, sur la base des feuilles de présence remises par les concierges, le préfet de police de Paris fait établir un « état numératif » détaillé des détenus écroués dans les prisons placées sous sa surveillance.
Voici le détail et la répartition des détenus, prison par prison, au 1er janvier 1823 :
Dépôt de la Préfecture de police : 62 hommes – 24 femmes
Presque toutes les personnes arrêtées dans Paris sont d’abord conduites au dépôt de la préfecture de police. L’élargissement est décidé pour les uns et le renvoi devant la justice pour les autres. En général, les personnes arrêtées n’y sont retenues que pour peu de jours.
Grande Force (prévenus) : 327 hommes
Les prévenus passent d’abord à la Grande Force, pendant l’instruction du procès, et ensuite à la Conciergerie, lorsque le jugement approche. La durée moyenne du séjour des prévenus à la Grande Force est de six mois, et de trois ou quatre à la Conciergerie.
Madelonnettes (prévenues, condamnées, prisonnières pour dettes, filles pour correction paternelle) : 278 filles et femmes
Sainte-Pélagie (prévenus, condamnés, prisonniers pour dettes) : 445 hommes
Hôtel Bazancourt (garçons pour correction paternelle) : 12 garçons
Maison de Justice (La Conciergerie) : 83 hommes – 25 femmes
La Maison de Justice est celle où l’on transfère les prévenus qui vont subir leur jugement, et d’où ils doivent sortir immédiatement après leur condamnation. Il s’agit de la Conciergerie qui occupe le sous-sol du palais de Justice, le long du quai de l’Horloge.
Bicêtre (condamnés et détenus administrativement) : 563 hommes
Saint-Lazare (prostituées, condamnées, filles au-dessous de 16 ans pour correction) : 411 filles et femmes
Petite Force (prostituées) : 450 femmes
Maison de répression du vagabondage (St-Denis) : 500 hommes – 358 femmes
Dépôt de mendicité à Villers-Cotterets : 443 hommes – 414 femmes
Abbaye (prison militaire) : 66 hommes
Montaigu (prison militaire) : 171 hommes
Les archives nationales conservent l’« état numératif » du 1er janvier 1823. Ce rapport établit par Guy Delavau, préfet de police de la ville de Paris (20 décembre 1821 – 6 janvier 1828) révèle, dans les prisons parisiennes, la présence de 2 672 détenus de sexe masculin, 1 960 de sexe féminin, soit une proportion de 42,31% sur un total de 4 632 prisonniers.
Ci-contre : Catalogue de l’exposition L’impossible photographie Prisons parisiennes 1851-2010 qui a été publié à l’occasion de l’exposition présentée au musée Carnavalet du 10 février au 4 Juillet 2010.
La réalité des prisons ne se réfléchit pas, ne s’imprime pas, elle n’est pas montrable, elle échappe à l’objectivité de la caméra. […] Non pas que les images seraient fausses, mais elles resteraient incomplètes, partielles, illusoires, donnant le sentiment de toujours devoir être décalées et dérisoires. Jean Gaumy, Les Incarcérés, coll. « Écrit sur l’image », Paris, Éditions de l’Étoile, 1983.
Pour participer à cette réflexion, différents chercheurs – écrivains, philosophes, historiens de la photographie, historiens du monde pénitentiaire, sociologue – analysent et décryptent un corpus de 3 800 images provenant d’institutions (musées, bibliothèques, archives, agences de presse…) et de collections privées.
Éditions PARIS musées, 204 p., 34×24 cm, 370 illustrations – Parution Février 2010