L’île d’Oléron : lieu de détention provisoire des individus frappés de déportation
Par Jacky Tronel | vendredi 6 avril 2012 | Catégorie : Dernières parutions, VARIA | Pas de commentaireLe Bulletin des Lois de la République N° 253, prescrit : « Le Directoire exécutif, considérant que les circonstances et le mauvais état de la santé […] ne permettent pas d’effectuer en ce moment leur translation au lieu précédemment assigné aux déportés, arrête ce qui suit : Art. Ier – Les individus frappés de déportation par les lois des 19 et 22 fructidor an V […] se rendront […] à l’île d’Oléron, et y resteront provisoirement… ». Le 28 nivôse an VII (17/01/1799).
Citadelle du château d’Oléron, entrée ouest par la porte fortifiée, photo Jean-Claude Perez.
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Texte de la loi du 28 Nivôse an VII :
« LE DIRECTOIRE EXÉCUTIF, considérant que les circonstances, et le mauvais état de la santé de plusieurs des individus qui ont fait, en exécution de la loi du 19 brumaire dernier, la déclaration de se soumettre, en ce qui les concerne, aux dispositions des lois des 19 et 22 fructidor an V, ne permettent pas d’effectuer en ce moment leur translation au lieu précédemment assigné aux déportés,
ARRÊTE ce qui suit :
ART. I.er – « Les individus frappés de déportation par les lois des 19 et 22 fructidor an V, et qui auront fait, dans le terme fixé par la loi du 19 brumaire an VII, la déclaration qu’elle prescrit, se rendront dans le délai de vingt jours, à compter de l’expiration du délai de deux mois qui leur a été accordé par cette loi, à l’île d’Oléron, et y resteront provisoirement jusqu’à ce qu’il soit autrement ordonné.
Les administrations qui ont reçu les déclarations ci-dessus mentionnées, leur fourniront les passe-ports nécessaires, et en préviendront le ministre de la police générale.
II. A leur arrivée, lesdits individus seront placés sous la surveillance de l’administration municipale de ce canton.
III. En exécution de l’article précédent, ils se présenteront les 5e et 10e jours de chaque décade, au lieu des séances de cette administration ; et il leur sera donné acte de leur présence.
IV. Le même jour, l’administration transmettra au commandant de l’île, le procès-verbal de leur comparution, lequel devra contenir la signature de chacun d’eux.
V. En cas de non-comparution, le commandant de l’île est chargé d’en vérifier les causes sans aucun délai.
VI. Ce commandant est chargé en outre, de s’assurer par tous les moyens de surveillance qui sont en son pouvoir, de la conduite et des relations des déportés ; il en rendra compte, chaque décade, au ministre de la police générale.
VII. Le ministre de la police générale est chargé de l’exécution du présent arrêté, qui sera imprimé au Bulletin des lois.
Pour expédition conforme, signé L. M. RÉVEILLÈRE-LÉPEAUX, président ; par le Directoire exécutif, le secrétaire général, LAGARDE. »
Barère, Billaud-Varenne et Collot d’Herbois, prisonniers sur l’île d’Oléron, en 1795
Dans ses mémoires, Bertrand Barère de Vieuzac, rapporteur attitré du Comité de Salut public, relate son transfert mouvementé de Paris jusqu’au château d’Oléron, lieu de détention provisoire avant la déportation en Guyanne. En compagnie de Jacques-Nicolas Varenne et Collot d’Herbois, tous trois anciens membres du Comité de Salut public et partisans de la Terreur, il fait l’expérience de la détention sur l’île d’Oléron… avant qu’elle ne devienne officiellement « lieu de détention provisoire des individus frappés de déportation ».
La citadelle du Château d’Oléron
La citadelle du Château d’Oléron d’après l’ingénieur-géographe Claude Masse, 1712 [source].
La citadelle du Château-d’Oléron est un ouvrage militaire édifié de 1630 à 1704 afin de protéger la partie méridionale de l’île d’Oléron. Elle est l’un des principaux monuments historiques de la ville du Château-d’Oléron, dans le département de la Charente-Maritime, dans le sud-ouest de la France. La citadelle succède à un ancien château fort tombé en désuétude au début du xviie siècle. Édifiée sur l’ordre du cardinal de Richelieu à partir de 1630, elle est modernisée ultérieurement par le maréchal Vauban et devient l’un des éléments-clef du dispositif de défense du littoral atlantique. Elle demeure longtemps l’un des lieux d’entraînement et d’embarquement pour les soldats en partance vers la Nouvelle-France.
Transformée en prison durant la Terreur, puis une nouvelle fois en 1870, la citadelle du Château d’Oléron est classée monument historique en 1929. Occupée par les Allemands en 1940, elle est endommagée à la suite d’un bombardement, le 17 avril 1945 [source].
Pour en savoir plus : Se reporter à l’article de Louis-José Barbançon : Aux origines de la guillotine sèche. La déportation dans les Assemblées révolutionnaires, publié sur le site Criminocorpus [Lien].